Texte
Nous avons commencé à nous inquiéter quant aux intentions de M. Barnadu. Celui-ci voulait, en fait, que l'on s'amuse à tirer quelques cartouches sur le mannequin en plastique. Mes amis et moi avons trouvé cette idée très incongrue. Nous avons d'abord refusé, prétextant l'envie de rentrer chez nous. Mais, il a commencé à s'énerver. Devant son insistance malsaine, j'ai finalement accepté d'essayer sa carabine. Il me l'a donc tendu. Lentement, dans un silence troublant, j'ai pointé le canon de l'arme vers la poupée. J'ai fermé un oeil, je visais... Je me concentrais sur l'objet. J'avais comme envie de l'esquinter le plus possible pour en finir avec cette soirée devenue peu rassurante. Je tremblais légèrement. Tout en fixant le mannequin, je tentais de stopper définitivement la faible vibration qu'exerçait le fusil. Peu à peu, j'y suis parvenu. Je commençais à presser doucement sur la gachette. Alors, j'ai eu l'impression qu'un frémissement quasi-imperceptible parcourait le mannequin. J'ai d'abord cru que celui-ci était le fruit de mon imagination. Le coup était prêt à partir quand j'ai vu, très distinctement, les yeux de la poupée cligner. Ne pouvant plus faire machine arrière, j'ai vite dévié la trajectoire du canon de l'arme afin de ne pas toucher le mannequin.